Plus d’un mois sans nouvelle contribution à ce blog. Pas bien. Vous me croyez si je vous dis que c’est à cause de mon perfectionnisme ? Ben oui, je rechigne à poster un article tant qu’il n’est pas peaufiné dans le détail. Résultat : j’étale la rédaction sur plusieurs jours et je ne finis parfois jamais. Alors, pour l’occasion je change de technique : je me remets dans la peau du moi adolescent sur les bancs d’école ; deux heures pour rédiger, corriger et mettre en page, pas une de plus ! Top chrono…
Mercredi dernier, mon ami le Gran’Greg et moi-même cherchons une bonne destination pour le ouikend. Quelque chose qui allierait pleine nature et bonnes rencontres, grimpe et chill-out, camping et bistrot. Pour ma part je donnerais bien dans la highline, et suis très attiré par un trip dans le Verdon pour rejoindre les Bad Slackliners et bien d’autres, qui se sentent près à envoyer 85m de highline (les bougres de mutants !) Et puis il y a les amis autrichiens que j’ai rencontrés à notre convention de jonglage Au Bout des Doigts, tellement sympas et ultra motivés. Les amis, désolé de ne pas être venu mais la météo verdonesque était bien trop incertaine. Pas mieux pour Céüse et Buoux. Le salut viendra une fois de plus de Mister MacDo (le forgeron de génie hein, pas le fastfood moisi) qui nous informe que le non moins motivé Fred Pascal va poser son soundsystem au pied de la falaise de Claret samedi soir!
Driiiiiiiing « Allo, Greg ? J’ai un plan pour ce week end. Regarde dans tes anciens GrimperMag’ l’article sur Claret, c’est là qu’on va !
-Gnnnhien ?
- Pardon. Réveille-toi tranquillou, regarde l’article de GrimperMag sur Claret et rappelle-moi. »
Dix minutes plus tard : « Popopop ! Allez on va à Claret, tchiki-bim tchiki-boum ! »
Et voilà que vendredi, nous partons avec en plus la bonne compagnie et l’énergie de Daniel, grimpeur-slackeur rencontré par le biais d’Ekilibre. Je peux vous dire que cette falaise réserve quelques surprises ! La première, l’échec généralisé de notre groupe dans « Je participe assez », la 5+ tellement dure qu’elle commence par un pas de bloc en 6a et enchaîne avec une 6c conti. Il doit être 10h et si nos muscles sont réchauffés, notre motivation, elle, a pris un coup de froid. Le cagnard commence à s’installer, nous allons au secteur « Escalator », à l’ombre toute la matinée et aux cotations réalistes. Ici, on commence à croiter tout doucement, « Escalator » 5+, « L’écaille Est » 6a, « Crapaudrome » 6a+, et « Le Péril Jaune » 6b+. Après ça, Greg part se mettre taquet dans « King of Bongo » 7a majeure du site mais ne dépassera pas la 3ème dégaine. Loin de remettre en cause le niveau de grimpe de mon ami, Claret nous explique ici qu’une nouvelle falaise majeure ne se parcours pas en un jour, il faut prendre le temps de la connaître, de l’apprivoiser. Bref, c’est le premier jour et nous n’avons pas encore bien appréhendé le Claret staïle : entre 3 et 5m entre les points, des départs bien bloc, et des plats en pagaille.
Allez, pour se détendre nous remontons d’une ou deux bornes la D107 pour rejoindre Christian et sa fille, Thomas, Vincent et la charmante compagnie de Vivianne et Sandy. Euh, j’ai parlé de détente ? Autant pour moi, je voulais dire highline, le truc avec le souffle cours et les mains moites. Alors la détente c’est surtout pour ceux qui ne slackent pas. D’ailleurs, pendant que je noue la longe en me concentrant pour maîtriser ma respiration et les battements de mon cœur, Greg en profite pour découper le cou de canard au foie gras offert par Hélène (que son nom soit loué !) Et là, tchiki bim ! J’envoie l’aller de la Bartas Line à vue. Le retour est plus coriace, la faute à une légère montée, ou le fait qu’on soit côté poulie ? La sangle tremble et je me laisse surprendre. C’est au deuxième essai et après un combat de quelques pas que je stabilise le système sangle/moi. Content le Rémy ! Je constate une réelle progression, je consomme beaucoup moins de watts à douter et je peux enchaîner bien plus de traversées qu’avant, je m’autorise même un knee drop et une posture allongée au milieu de la slack. Thomas a aussi bien pris du niveau depuis la dernière session à Castrie, en plus de son départ assis unique en son genre il tente des korean butt bounce. Quant à Daniel, il apprend à ses dépends qu’il y a une réelle différence entre notre petite highline de la passerelle et celle-ci, rocheuse et nettement plus engagée. Il n’osera pas se lever mais c’est un premier contact dont il se souviendra, rien de tel pour booster l’entraînement au sol !
De retour à la falaise, et après avoir enchaîné « Coït ou Double » 6a diédrique et sympathique, nous allons profiter du reggae-ragga-dub-electro-swing avec, entre autre, monsieur Fred Pascal aux platines. Des spots éclairent la paroi et, avec un demi d’ambrée locale à la main, adossé contre un rocher, on admire la jolie Caroline Ciavaldini, son compagnon James Pearson et d’autres mutants envoyer « Le Bon Bout d’un Blanc » 7c avec de jolis vols à la clé !
Vous l’aurez deviné, le lendemain on n’est pas frais du tout. La nuit en hamac a été hachée et plus froide que prévue, les hirondelles n’aiment pas les grasses mat’ et nous le font savoir, le lever sera tout de même tardif et notre petit groupe est globalement bien déshydraté. A notre rythme, enfin, lentement quoi, nous nous préparons à l’objectif de la journée, la 6c majeure de « Clair Obscur ». La plupart des grimpeurs présents l’ont déjà envoyée et ne tarissent pas d’éloges à son sujet. Mais nous, on a peur, parce que après l’avoir regardé de plus près on se rend compte qu’elle est un peu exposée jusqu’au troisième point et qu’elle reste bien engagée jusqu’à la fin. Sept dégaines pour 35 m de voie on n’a pas trop l’habitude… Alors nous profitons des bombés du « Théorème de Sisyphe » 6b pour s’envoyer joyeusement en l’air et se rappeler que la corde ne sert pas qu’à prendre sec.
Greg se lance pour poser les paires, guidé par Yann, qui connait les méthodes jusqu’au bout des orteils. Ca se voit qu’il flippe le Gran’Greg mais il n’a pas oublié ses bollocks en bas et le prouve enfaisant de la concurrence aux hirondelles à la sortie de la traversée après le repos intégral, le passage le plus gazeux de la voie. Puis, Daniel se lance. Une prise de pied lui faisant défaut juste au dessus du 4ème point et il passe à deux doigts de la perf’. Moi aussi c’est une prise de pieds qui me fera défaut, mais juste en dessous du 4ème point… Après avoir clippé la troisième dégaine, mes avant bras commencent à sérieusement chauffer, mais contrairement à mon habitude, je me lance sans réfléchir dans l’enchaînement de plat et de réglettes. Il y a tellement de prise poffées que la marche à suivre est simple : se servir de toutes les prises qu’on touche. J’arrive en dessous de la dégaine, une crougne main gauche, une oblique à droite et un pied gauche trop haut. Je cherche au mauvais endroit pendant quelques secondes, je sens l’explosion arriver. Un regard en dessous de moi, la corde est bien là. Je n’attends pas que mes mains s’ouvrent d’elles même, je lâche tout. Les prises et la peur de voler se retrouvent en éclair une dizaine de mètre plus haut.
Je crois que je n’avais jamais crié aussi spontanément. Mes premiers vols en salle ont donné lieu à des vocalises à demi bloquées dans la gorge mais là, tout est sorti ! Comment expliquer que cet état d’esprit que j’ai atteint entre le moment ou j’ai fait mon huit et celui ou j’étais suspendu à la corde est pour moi beaucoup plus important que la réussite de la voie ? C’était mon rêve quand j’ai commencé l’escalade, réussir à me mettre taquet sans arrière pensées jusqu’au relais ou jusqu’à la chute. Voilà c’est fait, maintenant je veux recommencer autant que possible !
Comme de coutume je finirais cet article par des remerciements pour ce week end d’anthologie. Merci à Hélène, Greg et Daniel ; à Christian, Thomas, Vincent, Vivianne et Sandy ; à Fred et tous les gens qui ont aidé à organiser la tawa de Claret ; à Yann pour nous avoir flashé « Clair Obscur ».